Alors que l’industrie du cannabis tente de sortir de son berceau en Amérique, certains groupes conservateurs sont prêts à tout pour combattre cette plante considérée comme diabolique. Ces organisations concentrent présentement leurs efforts pour stopper le processus de légalisation du cannabis aux États-Unis. Est-ce que leur croisade pourrait être couronnée de succès, ou le raz-de-marée vert est simplement trop puissant pour être stoppé?
Un lobby organisé
Smart Approaches to Marijuana (SAM) est une organisation de la région de Washington D.C. Malgré son nom qui inspire la modération, ce groupe est en réalité fortement opposé à la consommation de marijuana. Les responsables de la SAM viennent justement de verser un million de dollars à une campagne anti-cannabis en Californie. Ils espèrent également favoriser de telles initiatives dans l’État de New York, et influencer par la même occasion les électeurs.
Ce choix est en réalité très stratégique. En effet, l’État de New York est présentement au centre du débat américain sur le cannabis récréatif. Le gouverneur Andrew Cuomo se montre désormais très favorable à la légalisation de cette plante. En revanche, l’opposition s’est également organisée. En plus de la SAM, la Medical Society of the State of New York a signé pour 357 000$ en contrats de lobbying afin d’influencer les dépenses de l’État, notamment au niveau des budgets alloués au cannabis médical. Le sort du cannabis dans l’État de New York pourrait fortement influencer la suite des choses dans le reste de l’Amérique.
Un combat d’investisseurs
Dans leur rhétorique, les lobbyistes de la SAM critiquent souvent les investisseurs de Wall Street qui encouragent l’industrie du cannabis. Kevin Sabet, un représentant de cette organisation, estime mener un combat inégal. Il mentionne que les compagnies reliées à l’industrie du cannabis investissent des centaines de millions de dollars pour influencer positivement les politiciens et les bureaucrates américains. Sur ce point, il n’a pas tort. Il est vrai que les compagnies qui œuvrent dans le secteur de la marijuana tentent d’obtenir de puissants alliés dans l’appareil politique américain et canadien.
Sabet prétend également que la Smart Approaches to Marijuana est seulement financée par des particuliers qui sont inquiets à propos de la légalisation de la marijuana. Il nomme par exemple des médecins ou des comités de parents. Étrangement, une enquête du USA Today révèle qu’en 2016, la compagnie pharmaceutique de l’Arizona INSYS Therapeutics inc. a fait un don de 500 000$ aux organisateurs d’une campagne axée contre le cannabis récréatif. Ajoutons pour finir que INSYS Therapeutics produit des médicaments à base de cannabinoïdes. Cette pharmaceutique crée également une forme de fentanyl qui agit rapidement pour soulager les douleurs qui affligent les patients atteints de cancer. Bref, des symptômes qui peuvent être traités par la consommation de THC ou de CBD.
L’inquiétude envers cette plante ne proviendrait donc pas seulement de simples citoyens un peu conservateurs, mais aussi de grandes compagnies prêtes à investir des montants significatifs pour influencer l’opinion publique. Est-ce que l’intérêt principal de tels acteurs est de protéger la population d’elle-même en favorisant la prohibition du cannabis, ou simplement de garantir leur mainmise sur le marché du cannabis médical? Difficile à dire, mais la question mérite d’être posée!
Des vices publics?
Quoi qu’il en soit, laSmart Approaches to Marijuana maintient le cap dans sa croisade contre le cannabis. Leur porte-parole, Kevin Sabet, cite le tabac et l’alcool en guise d’exemples. Selon lui, la légalisation de ces deux substances est une source de malheur à la grandeur des États-Unis. Il estime que la normalisation de ces produits favorise leur consommation, en particulier chez les jeunes et les moins bien nantis. Dans cette logique, Sabet et ses collègues estiment qu’il est de leur devoir d’éviter que la même chose se produise avec le cannabis.
Il est évident que de nombreux intérêts contradictoires sont impliqués dans ce débat. Au-delà des arguments traditionnels proposés par les groupes de tempérance comme la Smart Approaches to Marijuana, la question économique est centrale.
Si certaines compagnies pharmaceutiques profitent de la prohibition en conservant le monopole des médicaments légaux contre la douleur, d’autres industries veulent à tout prix profiter du cannabis. C’est notamment le cas de l’industrie alimentaire et des grands brasseurs d’alcool. Ces derniers désirent offrir des boissons infusées au cannabis à toute l’Amérique du Nord. Évidemment, il faut des quantités industrielles de cannabis pour concrétiser un tel projet. Des milliers de producteurs pourraient donc profiter de la légalisation de cette plante.
Dans ce contexte, il est très probable que le combat entre les adeptes de la tempérance et les militants 420 friendly soit acharné. Plusieurs États doivent encore débattre de la légalité de cette plante, et le gouvernement fédéral américain ne semble pas pressé de se pencher sur la question.
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